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« Prêts à reprendre le travail, la tête haute »

Article paru dans La Marseillaise du mercredi 23 février 2011

 

ImageRue Mazenot, après 139 jours où les grévistes ont dégusté, l'heure est à savourer la victoire. Une belle issue qu'ils dédient, autour d'un barbecue, à l'ensemble des soutiens qui se sont mobilisés en leur faveur.


« 02 est bâti sur des roches, 02, oui oui oui ! 02, non non non ! 02 ne périra pas » ; « On est toujours là, on est toujours là, on est, on est, on est toujours là »…les chants triomphants s’enchaînent gaiement au son du tambour battant. C’est qu’ils l’ont arraché de longue lutte leur victoire, les postiers du 2e. Et comme s’auto-félicite justement Claude, « 139 jours de grève, c’est pas rien, fallait les tenir ! »

Dans la cour du petit centre de la rue Mazenod, l’ambiance a viré au beau fixe après plus de quatre mois de bras de fer avec leur direction. Et hier matin, c’est un mini concert qui accueille les médias, les élus et les membres du comité de soutien invités à saluer la bonne nouvelle. Devant une banderole « Victoire pour le service public et l’emploi » et des drapeaux rouges CGT fièrement dressés, l’orchestre symphonique postal improvisé marque cependant un petit break pour laisser place au discours qui tiendra lieu de conférence de presse. Mais le tambourinaire ne compte pas lâcher si facilement l’instrument de la fête « car aujourd’hui, même si ce n’est pas tout à fait fini, estime Michel, on savoure ».

Ils sont tous là et ne font qu’un autour de leur représentant syndical, le soulagement est visible sur leur visage. On dégaine les portables en mode caméra pour immortaliser l’instant. Parmi eux, Henri, le père de Jessica Dedieu laisse échapper quelques mots libérateurs : « la direction ne voulait plus d’elle, ma fille est enfin restaurée dans sa dignité ». Et pour tous : « On va enfin se coucher avec un gros souci en moins ce soir, même si on sait qu’il faudra rester vigilant sur ce qui nous a été promis ». Pas question pour Arnold, facteur sur la tournée des Accoules de se faire enfumer, même si aujourd’hui il est désigné chef barbecue. « On fêtera en grand plus tard, là, c’est juste une sardinade pour marquer le coup. Un peu de baume au cœur car ces derniers jours ont été durs pour les grévistes », explique le monsieur qui sait de quoi il en ressort. Entré à la Poste en 1983, il en a aussi connu les évolutions : « c’est un métier qu’on défend, le lien avec la population n’est pas secondaire ».

Au 02, les cœurs sont plus légers mais on ne fait pas disparaître ainsi quatre mois de tension. Tony, 8 ans de CDI, fête aussi ses 36 ans aujourd’hui et avoue avoir encore un goût de colère en travers de la gorge : « On a juste gagner le droit de rentrer dans nos droits, le droit d’exercer notre métier. C’est logique ça de se battre pour ça ? ». Amer, il ajoute : « comment une direction peut-elle ainsi mépriser ses salariés. Avant, une semaine de grève mettait tout le monde autour d’une table… » regrette le jeune homme qui ne masque pas son inquiétude pour des lendemains qui peuvent déchanter : « la qualité de service en a pris un coup ces derniers mois. Il va aussi falloir regagner la confiance des usagers… » De même, dans le local syndical, Claude s’interroge : « comment les usagers vont-ils vivre le retour du facteur? Pourquoi les grands médias nationaux n’ont pas écrit une ligne sur notre combat ? Ce doit être la Major qui nous fait de l’ombre ».

Mais du côté de l’opinion publique, certains sont déjà gagnés à leur cause. « C’est ensemble que ça a fonctionné, associations caritatives, usagers et postiers », souligne Georges Sanchis en repliant la table qui a servi aux pétitions « sans l’aide des association et la collecte de fonds les postiers n’auraient pas pu tenir, sans leur détermination à défendre le service pour le public, les associations ne se seraient pas mobilisées, c’est ensemble que les combats se mènent. Usagers et employés ». Et pour remercier ces soutiens, les postiers envisagent : « trois fêtes : une le 26 à l’Estaque où l’Harmonie organise un loto dont les recettes seront versées aux grévistes, une au centre social Baussenque et une grande soirée à définir… »

Au fond du centre de tri vide, au milieu des rangées de casiers où le travail a recommencé à s’organiser dès la matinée, un facteur est en place. Seul, il profite d’un moment de calme pour retrouver ses gestes, un paquet de lettres dans une main. Mais de l’autre il attrape son téléphone qui vient de biper. Et sourit : « C’est le 4e message de félicitation venant de personnes sur ma tournée que je viens de recevoir ».

Tous avouent reprendre le chemin du courrier avec émotion. On fait un dernier bilan des mois passés, « tous les jours on se retrouvait au local sans savoir comment cela allait finir. Décembre a été particulièrement difficile, note Virginie, employée aux colis, mais cette issue heureuse balaye toute la fatigue et les angoisses encaissées ». A ses côté Muriel, du service courrier, confirme : « Je me sens en forme, comme jamais depuis longtemps, fière de nous, je suis prête à reprendre le boulot la tête haute ».

Reportage M Guillaume
Photo R Terzian

Tag(s) : #Société
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