Les postiers endeuillés par un suicide
Article paru dans La Marseillaise du mercredi 12 janvier 2011
Les obsèques de Robert Palpant (55 ans), qui s’est donné la mort samedi en se jetant sous un train, ont lieu aujourd’hui. Sa veuve et la CGT mettent en cause les conditions de travail.
Un acte désespéré qui traduit le malaise profond des postiers face à la dégradation de leurs conditions de travail. C’est ainsi que
la CGT interprète le suicide, samedi, de Robert Palpant, caissier au bureau de Poste des quartiers Sud de Vitrolles. Sa veuve elle-même postière ne veut pas entendre parler de problèmes
personnels pour expliquer le geste de son mari. " Madame Palpant s’est exprimée publiquement. Elle est catégorique, ils n’avaient pas de difficultés financières, leurs deux enfants ont réussi
leurs études, rien dans sa vie personnelle n’a pu être le déclencheur d’un tel acte ", explique Michel Franchi de la CGT activités postales 13.
" Chez les postiers, l’émotion est grande, nous avons lancé un appel à cesser le travail pour honorer sa mémoire à l’occasion de ses
obsèques* ", témoigne le syndicaliste. La CGT y sera représentée officiellement. A la demande de la famille, aucun cadre ni membre de la direction n’y participera en revanche.
Interrogé sur ce triste événement, Laurent Mirallès au nom de La Poste, tient à " s’associer à la douleur des proches de Robert
Palpant " tout en affirmant que " la direction refuse d’établir tout lien avec les conditions de travail ".
Pour lui, " la lettre adressée au directeur de La Poste par Robert Palpant le 5 janvier n’évoque pas cette question, mais une
inquiétude sur une vérification comptable ". " L’agent qui a mis fin à ses jours n’a nullement été concerné par la nouvelle organisation mise en place il y a huit mois pour dimensionner le
personnel à l’activité de chaque bureau ", ajoute-t-il.
Dénégations de la direction
Le syndrome Orange-France Télécom aurait-il atteint La Poste après son changement de statut en mars 2010 et l’ouverture à la
concurrence, le 1er janvier dernier, de la distribution des courriers de moins de 50 grammes ?
"Aucune comparaison n’est possible, on ne peut faire du suicide un axe de communication. En tant que premier employeur de France,
nous connaissons des drames, il faut de la pudeur et de la retenue ", répond Laurent Mirrallès qui annonce par ailleurs la mise en place d’un " dispositif d’écoute " avec psychologue dès lundi
dans le bureau endeuillé.
Du côté de la CGT, c’est un tout autre son de cloche qui se fait entendre. " Ce n’est pas un cas isolé. Depuis moins d’un an, c’est
le 5e suicide de postiers dans les Bouches-du-Rhône ! ", s’indigne Michel Franchi.
Au-delà de l’émotion, les luttes
Le cégétiste insiste: " Ce drame intervient dans un contexte difficile. Presque tous les bureaux en sont à leur 3e réorganisation
avec, en arrière fond, l’objectif de La Poste de supprimer 40% des emplois à horizon 2015. " Pour lui, la situation appelle, au-delà de l’émotion, à des luttes " contre l’installation de la
précarité, les non-remplacement et la pression croissante ".
"Les postiers du 2e arrondissement de Marseille sont en grève depuis près de 100 jours contre ce cocktail explosif. Ils se heurtent
au refus de la direction de négocier. C’est aussi prendre une responsabilité dangereuse ", conclut-il.