Faim en Inde en 2013 suite à une sévère secheresse ?

C’est déjà plus qu’un spectre : la famine est en passe de frapper de nouveau en Inde, où des millions de personnes affrontent une sécheresse qualifiée d’historique. Selon le gouvernement, la situation dans le centre du Maharashtra, à l’ouest du pays, serait la plus alarmante depuis 1972, année terrible durant laquelle le manque d’eau avait dévasté des milliers d’hectares de cultures céréalières.

L’AFP rapportait ainsi, mercredi, des éléments on ne peut plus inquiétants. Jamais, indiquait-elle, reprenant les paroles du chef du gouvernement local, les réservoirs d’eau du pays n’ont été aussi bas. En dépit des 2 000 camions-citernes remplis d’eau potable qui alimentent les communautés, 10 000 villages seraient en situation très critique, alors que bétails et cultures dépérissent. Certains hôpitaux de la région témoignent, eux, d’une hausse des cas de maladies liées à l’eau, et prévoient l’émergence de problèmes de malnutrition. Bref, l’événement est sérieux, dans un pays où sept habitants sur dix vivent de l’agriculture.

Ce n’est pas la première fois que l’Inde traverse une telle crise. En 1979, en 1987 et en 2002, elle avait eu à affronter des déficits pluviométriques frisant les 20 %. Plus récemment, en 2009, la sécheresse avait frappé le sous-continent avec une intensité variable selon les régions. Cette année-là, déjà, on avait parlé de pire saison des pluies depuis 1972, année de référence absolue pour les 235 millions de paysans.

Cette fois comme les précédentes, faiblesse et retard des moussons sont en cause. « Les racines du mal plongent aussi dans la corruption et l’incurie, insiste l’AFP, la surface irriguée dans le Maharashtra a augmenté de seulement 0,1 % entre 2000 et 2010, alors que des milliards de dollars ont été dépensés à cet effet. »

Pauvreté et manque de moyens faisant le reste, les organismes internationaux estiment, au final, que 65 % des exploitations indiennes ne bénéficient toujours pas de système d’irrigation, maintenues sous la dépendance de la météo.

Problème de déficit des politiques publiques plus que de carence en eau ? La critique vaut à plus large échelle et pourrait de nouveau exploser internationalement. Troisième pays exportateur de riz, l’Inde est un acteur majeur du marché alimentaire mondial. On se souvient qu’en 2008, le prix du petit grain blanc avait été entraîné dans la tourmente de celui du blé, après que le sous-continent a décidé de bloquer ses exportations : anticipant une hausse du prix du blé et redoutant que la demande ne se reporte sur le riz, le géant indien avait, dans un réflexe protectionniste, décrété l’embargo dès 2007. Près de 2 millions de tonnes de riz avaient ainsi été soustraites au marché mondial. Paniqués, d’autres pays producteurs lui avaient emboîté le pas, entraînant, spéculation aidant, une hausse du prix du riz avant même que celui-ci ne vienne à manquer.

Quel risque que cela se reproduise ? Difficile à dire, mais ce qui est sûr, c’est que l’organisation mondiale des échanges agricoles ne s’est pas arrangée. Les marchés à terme – marchés financiers ouverts à la spéculation, sur lesquels les récoltes se vendent six mois à l’avance, voire plus – continuent de faire la pluie et le beau temps en matière de prix alimentaires. Outils de régulation potentiels, les stocks alimentaires mondiaux, eux, ne sont pas reconstitués, malgré la hausse de la production céréalière enregistrée depuis deux ans. En 2013, les réserves mondiales devraient ainsi afficher une moindre capacité d’utilisation par rapport à la précédente campagne, relève ainsi la FAO, dans un rapport paru début février.