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Politique - Article paru le 17 mars 2008 dans l(Humanité

Le « rôle social » de La Poste menacé

Service public . Dans un rapport, la Cour des comptes accuse les bureaux de poste d’être un « handicap » concurrentiel pour la Banque postale.

La Poste compte encore aujourd’hui 14 665 points de contact avec la population et 13 000 bureaux proprement dits. Jean-Paul Bailly, son PDG, porte le funeste projet de ne garder que 3 000 bureaux de plein exercice. Politiquement explosif, cet objectif vient de trouver un précieux soutien. En effet, la Cour des comptes a remis aux députés un rapport sur « la création de la Banque postale et ses deux premières années de fonctionnement », dans lequel elle préconise de réduire le réseau pour augmenter les atouts concurrentiels de la Banque postale. La Cour « conforte ceux qui veulent fragmenter l’entreprise nationale », dénonce FO communication dans un communiqué. « Nous refusons cette concurrence. La poste est un service public de proximité et doit le rester », prévient Colette Duynslaeger, secrétaire général de la Fédération CGT des activités postales et des télécommunications, qui milite pour « l’unicité de tous les services ».

Le rapport de la Cour des comptes n’y va pas par quatre chemins. Le document assure que « le réseau, dans sa configuration actuelle, constitue un handicap pour l’ensemble des activités commerciales de La Poste ». Il préconise donc « un réseau resserré ». La Cour propose aussi d’éviter que la banalisation du livret A ne laisse à la Banque postale, née en 2005, que les « populations à risque », et se plaint que « le coût moyen des fonctionnaires employés par La Poste reste supérieur à celui des salariés de droit privé ». En conclusion, le rapport de 72 pages considère que « la réforme de 2005 ne constitue qu’une étape », la filiale bancaire étant « pénalisée de manière concurrentielle par des singularités liées à son mode de fonctionnement qui repose sur une étroite symbiose avec le groupe La Poste ».

« Ce rapport est une bombe », a réagi Régis Blanchot, du syndicat SUD PTT, pour qui cette lecture « en dit long sur le sort que l’État et les dirigeants de La Poste réservent au service public postal ». SUD PTT dénonce aussi une volonté de « banaliser le livret A », la Cour dénonçant des « comportements non rentables » dus à la gratuité du service et à l’obligation légale d’ouvrir un livret à toute personne qui en fait la demande. « Il est bien connu que les populations défavorisées ont pour loisir principal d’encombrer les files d’attente des bureaux parce que cela ne coûte rien », ironique le syndicat. La banalisation du livret, aujourd’hui seulement délivré par La Poste et la Caisse d’épargne, « est directement visée par la directive européenne », explique Colette Duynslaeger qui voit dans la disparition de ces spécificités une « remise en question de l’accessibilité aux plus démunis et un moindre financement pour le logement social ».

La Cour des comptes suggère « une clarification du statut bancaire de La Poste » et semble accorder un feu vert au plan d’essaimage des fonctionnaires qui augurent d’une « privatisation par la gestion du personnel », dénonce la responsable CGT. Jean-Paul Bailly a en effet annoncé ne pas remplacer un départ en retraite sur trois, dans une situation où la plupart des embauches s’opèrent déjà sous contrat privé.

Reste que les syndicats défendent le rôle social de cette « banque pas comme les autres ». La CFE-CGC rappelle, par exemple, que la Banque postale « a aussi l’obligation de jouer un rôle social auprès des populations les plus défavorisées et les plus éloignées ». L’UNSA considère quant à elle qu’il est « impératif de maintenir, voire de développer le réseau de bureaux de poste afin de ne pas déliter le lien social en France ».

Paule Masson

Tag(s) : #Services publics
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