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RESTRUCTURER ET VENDRE AU PRIVÉ

Article Liberté 62 n°757 - Le 18 Mai 2007 – p.6 - Social

SERVICES PUBLICS, LA GRANDE BRADERIE, UN LIVRE DE DOMINIQUE DECÈZE

RESTRUCTURER ET VENDRE AU PRIVÉ

Par Pierre Pirierros

Les éditeurs font bien les choses et lorsque l’on ouvre le livre de Dominique Decèze sur "Les services publics, la grande braderie", (chez J.C. Gawsevitch), le sous-titre ne saurait masquer le ton général puisque l’ouvrage paraît dans la collection "Coup de gueule" ! Il en était de même pour "La Machine à broyer" sur la privatisation de France Télécom. Coup de gueule contre les dysfonctionnements, les prébendes, les casses successives, le pouvoir de quelques uns, etc. etc. Alors cette grande braderie ?

L’AVENIR des services publics est une question centrale de l’alternative au libéralisme. On ne peut pas prétendre mettre l’économie au service du social sans remettre en cause les dégâts causés par les tenants du libéralisme. Dans notre région, de nombreux élus ont pris les devants en mettant tout cela sur la place publique et l’on pense aussitôt au référendum organisé à Houdain par le maire PCF, Daniel Dewalle. "Touche à ma Poste, ma DDE, mon commissariat de police, mon Trésor public", cette exigence est au centre d’une action unanime du conseil municipal, action à laquelle est appelée à s’y associer, le plus naturellement du monde, toute la population houdinoise. Tous les électeurs (à partir de 18 ans, qu’ils soient inscrits ou non sur les listes électorales et quelle que soit leur nationalité) pourront voter avec une carte d’identité. À Houdain, donc, la solennité du référendum (non prévu dans les lois de la République) transforme l’acte citoyen et l’acte civique d’un seul coup en faisant des habitants les défenseurs autorisés et "légaux" des services publics appelés à disparaître ou à se restructurer, ce qui est quasiment la même chose, puisque de toutes façons, ils ne seront plus "présents" dans la commune.

La Poste fait même l’objet de querelles internes au sein même de son administration, à la direction départementale, le directeur du service "grand public" est pour la fermeture de La Poste dans sa configuration actuelle et le directeur "courrier" est pour son maintien. Cette cacophonie illustre bien le peu de bien fondé de La Poste pour ses services. La direction veut fermer le centre de tri pour ne garder qu’un petit guichet. Car le service public régule la vie de tous les citoyens, à commencer par les transports... Mais l’État ferme à tour de bras, hôpitaux, gares, postes, écoles, trésorerie, gendarmerie ; la Poste est malmenée dans son rôle initial et en janvier 2006, c’est la création de la Banque Postale et la disparition des CCP ! Une augmentation de 16,5% des dix plus hauts salaires de la Poste en 2005, le rapport social de l’entreprise est précis sur ce point. La revalorisation salariale de 1,2 % est proposée pour les employés de La Poste en 2006. L’augmentation atteint "79 % depuis 2001" et ces dix salaires représentent désormais "3,462 millions d’euros brut par an" au total, soit 28.850 euros brut par mois en moyenne pour chacun de ces dirigeants, membres du comité exécutif de la Poste. La proposition salariale de la direction pour 2006 est une véritable provocation ; la direction propose, en effet, pour les cadres 1 % de hausse avec en parallèle une augmentation individuelle maximale de 1,6 %, et pour les employés 1,2 %". Ces propositions concernent les quelque 100.000 contractuels de la Poste (qui compte en outre environ 200.000 fonctionnaires).

Gestionnite

Mais où commence et où s’arrête le périmètre des services publics, ce sont d’abord les services régaliens de l’État mais la massue des dégengagements, et pas seulement, dans les zones rurales, retombe sur la vie quotidienne du pays. L’Équipement ? C’est le transfert de la moitié des agents des directions départementales vers les conseils généraux et le ministère de l’Intérieur parle de "bouquet de services minimal !" De rapports en dérapages et de méthodes d’action en gestionnite tenace, des principes sont réaffirmés tout en axant le processus de décentralisation, des réformes de l’État, des obligations de service universel, dans un sens voulu par Bruxelles et l’Union européenne. La notion de concurrence fait son apparition à grands pas de prédateur, lorsque la droite parle de "modernisation des services publics", ce n’est pas un éloge vide de sens, c’est tout le contraire avec la casse successive et évidente pour réduire les budgets. Les termes de maintien, d’amélioration, de développement de l’accessibilité et de la qualité de ces mêmes services publics sont utilisés mais leur véritable signification est détournée des fondements des pratiques connues. Le rapport "Durieu" suscite des inquiétudes.

Restrictions budgétaires pour l’école

La politique faite dans l’éducation nationale avec les restrictions budgétaires massives en est l’exemple. L’apprentissage "junior" dès 14 ans, la précarisation de l’emploi, tout un contexte préoccupant pour la réussite de tous les jeunes. Plus de 600 postes vont être supprimés à la rentrée prochaine dans l’Académie de Lille. Aucune zone géographique n’est épargnée. Sous couvert d’" individualisation des parcours ", c’est une école à plusieurs vitesses qui est organisée. Pour certains élèves, la découverte professionnelle et un entretien individuel d’orientation dès la quatrième visent à préparer des sorties précoces du système scolaire. Pour d’autres, seront réservés la possibilité de déroger à la carte scolaire ou le développement des bourses au mérite. Ces mesures vont à l’encontre d’une politique de mixité sociale. Elles illustrent le tri social organisé par la loi Fillon. Comment penser faire mieux réussir tous les élèves dans des zones en difficulté en réduisant les exigences à un socle appauvri, sans proposer de mesures visant à favoriser les apprentissages pendant le temps scolaire ?

Quelle justice fiscale ?

La justice fiscale passe par une pérennité des services publics et contre la diminution des agents des impôts, en un peu moins de dix ans, nous en avons perdu 600 dans le Nord/Pas-de-Calais. Les syndicalistes de ce secteur relient directement la politique fiscale et la dette de l’État (thème récurrent dans la campagne électorale). Comment va évoluer cette fiscalité dans le cadre européen ? Comment définir le rôle de l’agent des impôts alors que la TVA représente un pourcentage important dans les recettes en regard de l’Impôt sur le revenu.

À EDF

edf-gdf-100-public.jpgLes "engagements" de service public inscrits dans le contrat signé entre la direction et l’État, qui n’ont jamais été négociés avec personne, portent l’empreinte des luttes menées toutes ces dernières années contre la privatisation. Mais, d’une part, le gouvernement oublie de dire aux Français que ces dispositions sont renégociables dès 2007. Et, d’autre part, il sait pertinemment que l’engrenage boursier dans lequel il engage aujourd’hui EDF battra en brèche dès que possible des digues volontairement provisoires.

Et l’Hôpital public ?

Chaque établissement connaît un manque budgétaire évident pour 2007, cela est la résultante de l’État prévisionnel des dépenses et des recettes qui fait apparaître des dysfonctionnements pour la marche normale puisque les établissements sont obligés de solder leur passif et organisés des reports de charges sur fonds propres. Des dotations supplémentaires immédiates sont exigées par les personnels et leurs principaux syndicats dont la CGT ; cela passe par une remise à plat des situations budgétaires de tous les établissements, l’ouverture de réelles négociations sur l’emploi et la formation. Les économies au niveau de la Sécurité sociale prônées en haut lieu pénalisent doublement les populations en créant une médecine à multi-vitesses et en faisant porter aux mutuelles un poids de plus en plus important. Le contexte actuel qui se pose est celui du devenir du Service public hospitalier : qualité du dialogue social en baisse, dégradation historique de la situation budgétaire des établissements, vécu et conditions de travail difficiles, salaires et reconnaissance professionnelle en berne, déficit d’emplois, précarisation en augmentation, pénurie de personnels qualifiés. Brader, c’est vendre à bas prix ! On vend ou on externalise les services publics, autrement dit le transfert au privé.



De : Liberté 62
mardi 29 mai 2007

Tag(s) : #Services publics
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