Fabienne Lacroix à Brignoles
| 09.03.12 | 13h02 • Mis à jour le 10.03.12 |
23h10
A 57 ans, Fabienne Lacroix ne se souvient pas d'avoir passé un jour sans la compagnie d'un artiste... "A commencer par mon premier mari, sculpteur,
s'amuse-t-elle. Et pourtant, je suis entrée en culture par la gestion et la comptabilité. Mais j'ai vite compris que je pouvais aider les artistes, mettre à leur disposition toutes les
ficelles du développement culturel, défendre leurs droits d'auteur, monter des dossiers et bien sûr organiser des rencontres, des expositions, des concerts..."
Cette femme débordante d'énergie a installé l'art modeste - référence au Musée des arts modestes de Sète - face au Palais des comtes de Provence, à Brignoles, dans
le Var. Créé en décembre 2011, son Bazar du Lézard est un lieu culturel qui a pour vocation d'accueillir de jeunes artistes. Mais plus encore d'être un solide maillon entre l'art et la
population la plus large. "La culture n'est pas réservée à l'élite : elle doit toucher le plus grand nombre, permettre les rencontres et les échanges, et de mieux vivre
ensemble."
Tout a commencé au début des années 1980, dans un centre culturel, à Hyères. Ce devait être une rapide collaboration, après laquelle il était prévu non pas qu'elle
retourne dans son Nord, à Lille, mais qu'elle s'installe en région parisienne. Et puis elle est tombée amoureuse de la région varoise. Et de plus en plus des artistes. Ce centre culturel,
c'était le Théâtre Denis. "Un théâtre à l'italienne, superbe, où la culture était éclectique et décloisonnée." Le programme affichait théâtre, musiques de rue, festivals de BD, de
marionnettes, cinéma, danse... Côté chansons, Claude Nougaro, Julien Clerc et bien d'autres y venaient... Dans les locaux du Théâtre Denis, l'on croisait François Truffaut qui tournait un film
et, aux alentours, Marguerite Duras. "C'était bouillonnant, les élus nous aidaient beaucoup", se rappelle-t-elle avec bonheur. "Puis la couleur politique de la municipalité a
changé, et les choses ont changé aussi pour nous..."
Mais, pour Fabienne Lacroix, le sillon est tracé. Une rencontre va l'ancrer durablement. Celle qui a lieu avec le premier directeur départemental de la musique et
de la danse du Var. Direction Brignoles. Là où sont hébergés les bureaux de cette instance dépendant du conseil général et du ministère de la culture. Et c'est l'embarquement immédiat pour plus
de vingt ans de missions culturelles.
Coup d'arrêt fin 2008. Que sait-elle faire, sinon accompagner et faire connaître les artistes, créer des événements, réaliser des expositions... ? Fabienne Lacroix
décide d'ouvrir sa propre galerie. Elle n'aime pas ce mot. Elle préfère dire "espace d'art modeste". En 2010, elle achète une sorte de cave, un garage-parking rue des Lanciers, dans le
vieux Brignoles, "avec mes indemnités de licenciement et mon énergie pour le réhabiliter". Impatiente, elle ouvre le chantier avant la fin des travaux, souhaitant "que son lieu
encore en gestation participe à sa manière aux Journées du patrimoine de septembre 2011, dont le thème était le voyage, et que le public vienne". Trois graphistes réalisent pour
l'occasion, sur une même toile, en direct, une oeuvre collaborative, le voyage imaginaire dans le ciel d'un troupeau d'éléphants.
Avec l'ouverture en décembre 2011 du Bazar du Lézard, les anciens du vieux Brignoles qui venaient la conseiller pour les travaux viendront désormais voir les
expositions, discuter et parfois aussi essayer de comprendre ce que les artistes ont essayé de dire, de faire...
Vendredi 10 février, la neige bloquait toute la région. Le Bazar du Lézard fêtait sa deuxième exposition. Gérard Desprez, libraire à Brignoles depuis juillet 2010,
y était. C'est dans sa librairie que l'oeuvre collaborative des éléphants a poursuivi son voyage. Il faut dire que la belle hauteur de plafond du Bateau blanc se prête bien à la toile immense
(1,50 m sur 2,40 m). Depuis, elle accueille tous ceux qui entrent dans la librairie. Il est impossible de ne pas la voir, même de la rue. "Amateur d'art, je l'ai en effet achetée pour sa
valeur picturale, explique Gérard Desprez, mais aussi pour que l'art puisse circuler dans la ville, être vu et marquer de sa présence l'espace public. Il est important d'oeuvrer
ensemble pour réussir à développer des activités et partenariats culturels. il n'y a qu'ensemble que l'on peut faire entrer la culture dans la cité." On vote pour.
Sur le Web : www.lebazardulezard.com.
Prochain article : Pascal Yonet, commissaire d'exposition à Fresnes-au-Mont, en Lorraine.
Article paru dans l'édition du 10.03.12