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 28 700 chômeurs de PACA bientôt confiés à des prestataires privés !

 


Article paru dans La Marseillaise du mercredi 9 septembre 2009



Le service public de l’emploi, c’est encore une garantie de rappel de règles à des employeurs qui sont dans une surenchère permanente.(Photo MLT)
Le service public de l’emploi, c’est encore une garantie de rappel de règles à des employeurs qui sont dans une surenchère permanente.(Photo MLT)
Une « solution » pour améliorer le service public de l’emploi qui est loin de convaincre tout le monde.


 

« On a déjà perdu en qualité. Avec les tarifs en baisse de Pôle emploi, les prestataires sont obligés de faire du chiffre pour être rentables et on doit suivre de plus en plus de demandeurs d’emploi. S’ajoutent à cela les problèmes "d’aiguillage" des publics et les demandes administratives exponentielles de Pôle Emploi qui sont chronophages ». Lucie est accompagnatrice à l’emploi dans une association prestataire de l’ex-ANPE et aujourd’hui de Pôle Emploi*. Mais l’actualité est à l’appel d’offre toujours en cours - suite à des plaintes en justice - et qui devra permettre de sous-traiter l’accompagnement de 14 800 personnes en zone ouest de PACA (Bouches-du-Rhône et Vaucluse) et 13 900 en zone est (les autres départements), en déclinant deux dispositifs - trajectoire, destiné aux chômeurs avec risque de longue durée et aux licenciés économiques - de respectivement 6 et 12 mois.
    Pour Lucie, prestataire de services, la cause est entendue : « s’il y a encore des gens motivés à l’ANPE, beaucoup font surtout de l’abattage et sont très éloignés du monde du travail tel qu’il est actuellement. D’où notre pertinence ». Ce qu’Emilie Cantrin, déléguée CGT à l’ex-ANPE avait en partie pointé au moment de la fusion, avec d’autres termes et une analyse différente : « on fait en sorte que nous ne puissions plus faire notre métier d’accompagnateur à l’emploi. Les agents ont beaucoup trop de dossiers à suivre et même le système informatique est configuré en choix restreints. On doit se contenter de remplir des cases pour enregistrer des gens ».
    Car forcément, la qualité du service rendu est liée aux conditions de travail. Ce que notent les délégués CFDT de Pôle Emploi. « Cette fusion était sensée rendre le service public plus performant. Or, il y a tellement de retard que chacun continue son métier initial, que faute de préparation pour faire la fusion dans des conditions correctes, aucun site de PACA ne l’a fait » analyse Jean-Marc Cavagnera, délégué CFDT. « C’est en cours et nous allons monter en puissance dès septembre » tempère Pierre Pelladan de la direction de Pôle Emploi.


    Le recours aux prestataires devait soulager un service public débordé, mais qu’on ne voulait pas doter des moyens suffisants. « Pas seulement » réfute Pierre Pelladan, « travailler avec des prestataires permettra d’élargir notre champ d’intervention auprès des entreprises car nous ne couvrons pas 100% des offres. Nous allons travailler non en concurrence mais en complémentarité, même si je contrôlerai le travail des prestataires, un système de paiement sophistiqué ayant été mis en place pour éviter les dérives ».
    Mais pour quels résultats ? « On est sur un taux de 10 à 20% de CDD de 6 mois d’au moins 20 heures, décrochés » estime Lucie. « Pas mieux que Pôle Emploi mais comment pourrait-il en être autrement, le marché de l’emploi est le même pour tous » analyse Jean-Marc Cavagnera. « Les dispositifs menés par l’assurance chômage et qui ont servi de modèles au cahier des charges avaient de meilleurs résultats » assure Pierre Pelladan.


    Devant cette difficulté à combattre le chômage se dessine le second effet kiss-cool : l’arrivée des boîtes d’interim : « le danger vient plus d’eux que de nous » apprécie encore Lucie, « Qu’est-ce qui les empêche de dire aux demandeurs d’emploi que leur projet est irréalisable, de le réorienter selon les besoins de leur client pour ensuite empocher les euros de Pôle Emploi ? C’est tout bénéf’ ». Un principe qui ne choque pas Pierre Pelladan, « le seul critère important, c’est d’aboutir à un emploi ».
    « On veut tout externaliser pour ne nous laisser que le contrôle » prophétise Gérard Sourdon, délégué CFDT. « Si le service public disparaît, cela signifie des demandeurs d’emploi livrés à des officines qui ne s’occuperont que des plus performants. Sans compter que l’ANPE a encore une mission de rappel des règles et des cadres à des employeurs qui sont dans une surenchère permanente pour des contrats de plus en plus précaires et des salaires dérisoires » ajoute Mariella Lasselin, autre élue CFDT. « Les employeurs sont de plus en plus exigeants » confirme Lucie, « la moindre secrétaire doit parler trois langues, tout le monde doit avoir son permis … Forcément, les personnes les plus sur le carreau sont les premières touchées ». Si Pierre Pelladan confirme ce dernier point, il se refuse à croire en la mort du service public : « la situation est peut-être plus tendue mais rééquilibrer des demandes extravagantes des employeurs ou des demandeurs d’emploi constitue le cœur de notre métier. Comment croire à sa disparition alors que nous continuons à embaucher ? De plus, les dossiers donnés aux prestataires ne représentent que 10% des demandeurs d’emploi ». Aujourd’hui, et pour deux ans.  

* Simple employée, Lucie a préféré garder l’anonymat.

http://www.lamarseillaise.fr/le-fait-du-jour/l-trange-salut-qui-viendrait-du-priv.html
Tag(s) : #Economie
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