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TVA à 5,5% : Un arrière goût d'arnaque dans la restauration !



TVA à 5,5 %. Consommateurs bernés, salariés méprisés, les 3 milliards d’euros de manque à gagner pour les finances publiques ne profiteront-ils qu’aux trésoreries patronales ? Lire la suite dans l’Humanité de jeudi 28 août 2009.


Un bon paquet d’oseille pour certains patrons, une poignée de figues pour la plupart des consommateurs, quelques cacahuètes pour les salariés des hôtels, cafés et restaurants (HCR) : le Château TVA 2009 débouché par les chefs de la Sarkozie le 1er juillet dernier, qui devait faire connaître à des millions de vacanciers l’ivresse de la baisse des prix dans la gastronomie française, a tourné au vinaigre. Au point que le ministre de l’Emploi Laurent Wauquiez a fait savoir qu’il avait interrompu ses congés pour aller sermonner, à Paris, un restaurateur récalcitrant en lui disant « qu’il pouvait faire mieux ». Et que le député (UMP) Éric Ciotti a demandé un « moratoire sur la baisse de la TVA dans la restauration ». Élu à Nice, il a pu constater comme tout un chacun (lire ci-contre) que dans la capitale de la Côte d’Azur comme dans toutes les grandes zones touristiques du pays, « si certains restaurateurs exemplaires ont respecté leur engagement, ce n’est pas le cas de la majorité des établissements ».

Dans la poche des patrons

Ces engagements sont contenus dans un « contrat d’avenir », conclu au printemps dernier entre le ministère de l’Économie et les syndicats patronaux des HCR et discothèques, peu après que Nicolas Sarkozy eut obtenu le feu vert de la Commission européenne pour faire passer sur les additions (hors boissons alcoolisées) le taux de TVA de 19,6 % à 5,5 % en métropole, ce qui l’amenait à 2,2 % outre-mer. En contrepartie de cette baisse, qui représente pour l’État un manque à gagner estimé à 3 milliards d’euros, les professionnels étaient appelés à faire un effort selon une règle tacite des trois tiers. Un tiers pour les consommateurs par le biais d’une répercussion de la baisse de la TVA sur les additions ; un tiers pour les salariés en augmentant les salaires et en créant 40 000 emplois en deux ans ; un tiers pour la « modernisation » des entreprises et de l’outil de travail. Au vu des premières tendances révélées par l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), il semblerait, comme aurait dit César-Raimu derrière son comptoir, qu’un quatrième tiers soit en passe d’aller directement gonfler la trésorerie des patrons.

Les professionnels de la restauration traditionnelle auraient dû baisser leurs prix d’au moins 11,8 % sur sept produits à choisir sur une liste de dix correspondant à un repas complet (entrée, plat, dessert, boisson non alcoolisée, café ou infusion). Or, après avoir relevé en juillet quelque six mille prix, l’INSEE a établi que la baisse n’a été que de 1,3 % dans les restaurants et de 0,7 % dans les cafés. De plus, selon la Direction générale de la répression des fraudes, un établissement sur deux seulement a joué le jeu… et parfois de manière plutôt subtile, n’étant en fait tenu à aucune obligation légale. C’est ainsi qu’en plein été le prix cassé s’appliquait plutôt à la choucroute garnie qu’au poisson grillé et que des fournisseurs ont pu enregistrer des pressions exercées par de grands groupes hôteliers pour qu’ils baissent leurs prix. Autrement dit, bien des patrons ont sans doute gagné sur les deux ardoises : celle du maintien ou de l’augmentation du chiffre d’affaires et celle de l’exonération de TVA.

Emploi, la grande entourloupe

Quant à la mise en œuvre du contrat d’avenir, les syndicats de salariés, outrés (à l’exception de la CFDT et de la CGC) par les propositions salariales qui leur étaient faites (lire ci-contre), commencent à s’inquiéter sérieusement. La promesse de l’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie (UMIH) de créer 40 000 emplois en deux ans dégage un fort fumet d’entourloupe. D’abord parce que la moitié de ces « emplois » sont en fait des contrats d’apprentissage ne débouchant pas forcément sur un travail stable. Ensuite parce que l’aide à l’embauche (de 140 à 180 euros) instituée pour le secteur, en attendant la baisse de la TVA vient logiquement d’être supprimée, ce qui va un peu plus freiner les ardeurs patronales. Enfin et surtout parce qu’actuellement près de cinquante mille postes de travail ne trouvent pas preneurs du fait de rémunérations jugées trop faibles en regard de la pénibilité de ces emplois.

Reste le volet « modernisation et investissement » à propos duquel les organisations patronales ont pour l’instant « peu de remontées ». « Il faut attendre la fin de la saison estivale pour commencer à mesurer l’impact de la crise sur nos établissements », dit-on à l’UMIH. Le gouvernement prend lui aussi son temps pour faire le point précisément sur tous les aspects du contrat d’avenir. Hervé Novelli, ministre du Commerce, a mis en place un « comité de suivi » qui devrait publier ses premières « observations » en décembre prochain. Le Père Noël, ayant dans sa hotte un joli cadeau fiscal, sera, lui, déjà passé durant l’été dans bien des grands hôtels et restaurants : pour un palace de la Côte d’Azur, par exemple, le non-reversement de TVA sur la restauration et les petits déjeuners peut représenter jusqu’à 1,5 million d’euros.


Par Philippe Jérôme


http://www.humanite.fr/Un-arriere-gout-d-arnaque-dans-la-restauration
Tag(s) : #Economie
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