Article paru le 30 juillet 2009 dans l'Humanité
Editorial Par Patrick Le Hyaric
Taxe carbone : C’est un nouvel impôt !
Même repeint en vert foncé, même baptisé du présentable nom de « contribution climat énergie », un impôt
reste un impôt. Que celui-ci soit annoncé, confirmé, commercialisé, pour le compte de monsieur Sarkozy par un VRP de luxe, ancien premier ministre socialiste, a un sens politique profond :
celui de rechercher un consensus national au service des puissances d’argent. L’alliance Sarkozy-Rocard-Cohn-Bendit et de certains dirigeants socialistes vise, comme pour l’emprunt d’État, la
recherche d’une unité nationale dans le cadre de la crise pour renflouer les caisses de l’État sans jamais toucher aux profits des grandes entreprises. Au contraire, l’objectif fondamental est de
trouver les moyens pour transférer toujours plus d’argent du travail et de l’épargne des ménages vers le capital. Cela se fait cette fois, sous couvert de la nécessité de préserver
l’environnement et la planète. Évidemment, nous ne contestons pas l’impérieuse nécessité de défendre l’avenir écologique du monde. Mais ici, il ne s’agit pas de cela. L’idée principale est de
supprimer la taxe professionnelle et de combler les déficits ainsi créés, comme d’ailleurs les cadeaux aux banquiers, par un impôt nouveau en se servant de l’une des préoccupations majeures de
nos concitoyens. D’ailleurs, à bien y réfléchir, il n’y a pas de meilleurs moyens de dégoûter les gens de l’écologie que de procéder ainsi. Et qu’on ne vienne pas nous traiter d’affreux
fossoyeurs de la planète parce que nous refuserions cette nouvelle taxation du travail et des retraites ! Une véritable action efficace pour le climat, l’environnement, la préservation des
espèces et de la biosphère passe par une vraie révolution écologique qui ne peut qu’être anticapitaliste. Celle-ci induirait des orientations de longs termes et des actions urgentes pour
transformer nos systèmes productifs et de consommation, en donnant des pouvoirs réels aux salariés dans les entreprises et les services, ainsi qu’aux populations, pour obtenir de nouvelles normes
écologiques et sociales. Développer le ferroutage au lieu de ces hordes de camions sur les autoroutes. Cesser de privatiser les entreprises et de les mettre en concurrence afin que les citoyens
disposent d’un pouvoir d’intervention pour des gestions favorisant l’écologie, la qualité des produits et la manière de produire, de l’énergie au crédit, de l’eau au transport, de la gestion des
déchets à l’alimentation ; aider considérablement la recherche publique pour inventer les nouveaux matériaux plus propres pour les véhicules, l’énergie, le bâtiment, l’agriculture et
l’alimentation. Repenser la planète, c’est aussi mettre un frein à cette libre circulation des capitaux et des marchandises qui provoque un développement mondial inégal, le pillage des pays en
voie de développement en les obligeant souvent à produire pour l’exportation, ce qui induit des transports polluants. Cette invention sarko-rocardienne de « contribution climat
énergie » est un leurre, un mensonge, une injustice de plus. Toutes les familles, sans distinction de revenus, le paieront. Et il semble que les grands industriels, principaux pollueurs,
déjà soumis à la règle des quotas européens d’émission de carbone gratuits, ne la paieront donc pas. Décidément, une nouvelle fois la droite ultralibérale s’appuie sur une vraie question posée à
l’humanité, mais surtout sur les résultats des élections européennes pour faire perdurer le capitalisme financier, badigeonné de vert, pourtant responsable de la dégradation de l’environnement.
Tout en refusant le piège de ce consensus national, nous préconisons un vrai débat sur les moyens de changer les modes et les rapports de production afin de combiner progrès social, progrès
démocratique et progrès écologique.